jeudi 4 octobre 2007

"Les Trois Europes" : le pouvoir de l'Eglise : Réforme et Contre-Réforme

Si la loi française de 1901 sur l’association à but non lucratif a mis autant de temps à être promulguée, c’est parce qu’une opposition farouche à l’Eglise remontant aux temps révolutionnaires ne voulait pas entraîner dans le sillage de la liberté d’association celle des congrégations religieuses. Par ailleurs, en Hongrie, l’Eglise ne fut pas le moteur du développement de la « société civile » comme en Pologne.
Etudier la place de l’Eglise dans l’évolution des sociétés française et hongroise nous semble donc pertinent pour comprendre le développement du milieu associatif.

a) Le vent de la réforme
La Réforme remporte en Hongrie un succès important, même si elle divise le pays.
En effet, elle permet non seulement de lutter contre un clergé corrompu mais aussi et surtout d’endosser une identité nationale : la prière se fait dans la langue maternelle et la Réforme prêche clairement pour la libération du joug turc.
Plusieurs barons prennent ainsi sous leur protection des prédicateurs protestants.
Courants luthériens et calvinistes se répandent parmi toutes les couches de la population : magnats, nobles et ruraux. La classe dominante entraîne dans son sillage la conversion de tout un cercle d’influence. Par ailleurs, les protestants créent des écoles et des maisons d’édition : plus de 200 écoles élémentaires et des dizaines d’imprimerie sont crées dès le XVIe siècle, permettant l’édition de la première littérature nationale en langue hongroise et la floraison de la poésie épique et nationale.

L’Eglise catholique, appauvrie, n’a pas eu les moyens de lutter contre cet élan de popularité : après l’appropriation de biens ecclésiastiques par plusieurs rois hongrois, ce sont les occupants puis les brigands profitant du chaos qui dépouillent l’Eglise de ses possessions. Enfin, plusieurs évêchés tombent aux mains de barons.

En l’absence d’Etat fort avant la période du despotisme éclairé, l’Eglise catholique ne bénéficie pas du soutien apporté par l’absolutisme français à la Contre-Réforme.
En France, Etat et Eglise ne font qu’un avec la notion de monarchie absolue de droit divin. Ainsi, c’est le pouvoir royal qui lutte contre les protestants par la Révocation de l’Edit de Nantes en 1685, lui permettant ainsi d’instaurer une unité religieuse beaucoup plus significative et facile à gouverner au regard de la diversité religieuse de l’Empire habsbourgeois.

En comparaison avec les mesures radicales de l’absolutisme, la Contre-Réforme de Marie-Thérèse est toute relative : le despotisme éclairé se développe à une époque où les courants religieux perdent leur influence au profit des philosophes et des intellectuels. Si les jésuites prennent en charge une partie importante de l’enseignement jusqu’à la dissolution de l’ordre en 1773, leur influence dans l’enseignement français se maintiendra jusqu’à nos jours. Par ailleurs, la liberté des congrégations religieuses est sérieusement entravée par Joseph II.[1]
Ainsi, la faiblesse de l’Eglise catholique hongroise ne permettra pas, comme en Pologne, d’instaurer une unité nationale ni de développer en son sein une société civile. En France, au contraire, l’Eglise marquera durablement la société française, d’abord en freinant la libre association, puis en s’opposant à la puissance étatique laïcisée.

b) Le pouvoir de l’Eglise en France
C’est parce que l’Eglise concourt à maintenir une société d’ordres inégalitaire que la Révolution française s’oppose à elle et non parce qu’elle serait intrinsèquement antireligieuse. D’ailleurs, le bas clergé embrasse la cause révolutionnaire, soucieuse de réformer la hiérarchie ecclésiastique. C’est la volonté d’instaurer une constitution civile au clergé qui conduira au schisme. Dès lors, Eglise et Etat s’opposeront durement jusqu’au XXe siècle, l’Etat mettant sous son autorité l’Eglise avec la signature du Concordat en 1801 : premièrement, la religion catholique n’est plus la seule reconnue ; deuxièmement, ses biens lui sont confisqués et ses revenus surveillés par l’intermédiaire du budget sur les cultes.
[1] Cf. ci-avant

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